« C’est un secret de polichinelle. Ariel Henry était un choix de l’ancien président Michel Martelly. Ce n’est pas une invention, c’est le président lui-même qui me l’a dit. À ce moment, on était dans une salle accompagné du président, d’Ariel Henry et d’un autre proche du président », a déclaré l’ancien Premier ministre par intérim Claude Joseph. Plus loin, il a fourni plus de détails sur ses allégations. « Ariel Henry a été imposé. Le président Jovenel Moïse avait la chance de choisir que de rares Premiers ministres tant qu’il était sous pression. Je suis l’un des rares Premiers ministres que le président Jovenel Moïse ait choisi par intérim et qui ne faisait partie d’aucun parti politique ou de secteur politique. Le président me l’avait dit et Ariel Henry était dans la salle, c’est-à-dire que je ne suis pas en train de mentir. Cela est fondamental. C’était un samedi chez le président. L’arrêté a été publié le lundi, et le président a été assassiné le mercredi. Tout de suite après son assassinat, le président du PHTK avait clairement dit qu’il ne participerait pas aux élections avec moi comme Premier ministre, c’est-à-dire que j’étais pas la personne idéale pour couvrir le crime », a déduit M. Joseph.
L’ancien ministre des Affaires étrangères se rappelle qu’un beau matin, le président Jovenel lui avait dit : « Claude, nèg yo pa vlew. Claude, nèg PHTK yo pa vlew paske yo panse ou pap vin fè eleksyon pou yo ». « Le président, pour les personnes qui le connaissaient, était tiraillé. Par élégance, je lui ai dit que j’étais prêt à le servir n’importe où, mais qu’il était important de trouver un dégel de la situation, de trouver un Premier ministre. Et le Premier ministre Ariel Henry est un Premier ministre transversal. Ariel Henry connait Moïse Jean Charles, Michel Martelly… Dans les conditions normales, il serait la personne idéale pour coudre les tissus déchirés », a-t-il avancé, admettant avoir vu en la personne d’Ariel Henry la personne la mieux placée pour occuper ce poste jusqu’au jour de la sortie du rapport de la Direction centrale de la police judiciaire. « Si j’avais su qu’Ariel avait parlé à Badio, qu’il serait soupçonné, je n’allais pas lui remettre le pouvoir. Je l’aurais remis à des gens de la société civile organisée, parce que je n’aurais pas remis le pouvoir à une personne soupçonnée dans ce crime et qu’il allait faire obstruction à la justice, et c’est ce qu’Ariel Henry a fait depuis le jour de son arrivée au pouvoir », a-t-il dénoncé.
« Le véritable obstacle à l’aboutissement de l’enquête sur l’assassinat de Jovenel Moïse est ce gouvernement, particulièrement le Premier ministre Ariel Henry », croit Claude Joseph. « Ariel Henry pourrait ne pas participer, ne pas être l’un des criminels, mais il couvre les criminels parce que très probablement il a été choisi par l’un d’entre eux », a critiqué M. Joseph, qui a souligné avoir toujours dit que Jovenel Moise s’est fait beaucoup d’ennemis. « J’ai toujours dit que probablement c’est un crime transversal qui implique des secteurs politiques et des pans économiques, mais je crois qu’il revient à la justice de faire son travail parce que c’est elle qui a le dernier mot », a-t-il soutenu.
Le président Jovenel Moïse a été assassiné chez lui le 7 juillet 2021. La justice haïtienne tarde à faire la lumière sur ce crime. Le mandat de Merlan Belabre, le quatrième juge à qui le dossier a été confié le 4 mars 2022, est arrivé à terme le 25 avril. À noter que l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moïse a été déjà confiée à trois juges d’instruction avant le juge Belabre. Il s’agit de Mathieu Chanlatte, Garry Orélien et Chavannes Etienne. Deux d’entre eux se sont déportés de l’affaire et le troisième a été écarté par le doyen, en l’occurrence le juge Garry Orélien.
Source : Le nouvelliste