« Notre constat, c’est qu’un peu partout, la démocratie dans sa version minimaliste a triomphé. En effet, c’est la version qui considère les élections comme la pierre angulaire. Or nous avons vu que sur ce chapitre-là, il y a beaucoup de limites à ce processus qui est en cours. Dans la mesure où ce processus est un peu corrompu par le clientélisme électoral, il est sous le coup de la corruption des élites. Il y a une sorte de découplage, de déconnexion entre la démocratie en tant que telle et les performances des dirigeants qui sont élus dans un contexte comme celui-là.
On a l’impression que les élites dirigeantes, les élites en compétitions profitent de l’ignorance, de la pauvreté pour exploiter ses facteurs pour accéder au pouvoir. Cela fait que finalement, elles ne rendent pas compte des performances qu’elles réalisent dans la satisfaction des besoins des populations. Au niveau d’Haiti, je pense qu’un premier aspect sur lequel nous avons insisté, c’est l’éducation. Nous sommes dans un contexte où les ¾ de la population sont analphabètes, ne comprennent pas ce que signifie démocratie ; donc le travail d’éducation, de formation des citoyens est important, pour qu’ils s’approprient l’idéal démocratique, pour qu’ils puissent exercer les droits et les devoirs qui leur reviennent. Je pense que c’est un facteur important. Le deuxième facteur, c’est mettre l’éthique au centre de la démocratie. Car s’il n’y a pas d’éthique, cela veut dire que la fin justifie les moyens, cela veut dire que la démocratie n’est plus un service qui est rendu au citoyen et cela n’a plus de sens. »
Nous travaillons avec une démocratie égarée et avariée qui nous vient directement de l’Europe. Nous avons une démocratie construite sur du flottant qui est l’opinion, nous avons oublié que la seule chose qui est en nous c’est notre responsabilité par rapport à tous les autres. Pour cela, je propose de revenir, de reconstruire la démocratie, la base de la responsabilité naturelle de chacun. En Haiti, il n’y a pas de démocratie. Il faut, pour réussir la démocratie en Haiti, redéfinir, régénérer la démocratie dans sa forme naturelle réelle qui est l’implication de tout le monde et pas du tout de quelques opinions dominantes. Ensuite, on verra comment apporter des améliorations.