La démocratie garantit des droits et des devoirs à toute la population sans exception, quel que soit l’origine, la couleur de la peau ou la culture des personnes. Les droits peuvent se résumer comme suit : droit à l’éducation, droit à la nourriture, droit au logement, droit à la liberté d’expression et à tous autres droits civiques. En ce qui
concerne les devoirs, je dirais que les bénéficiaires des droits doivent en retour respecter les normes et les principes que la société leur impose afin de garantir leur bon fonctionnement.
Au début des années 1990, Haïti a choisi de devenir un pays démocratique. Trois décennies plus tard, elle se trouve dans le chaos. Qu’est-ce qui a causé cette situation ? Les autorités haïtiennes remplissent-elles leurs devoirs envers la population ? La démocratie est-elle efficace en Haïti ? Si nous prenons en compte la réalité d’Haïti, et particulièrement le niveau des inégalités sociales, on peut dire que les conditions pour la démocratie n’ont pas été
réunies. Elles ont été bafouées par nos propres dirigeants. La population haïtienne est laissée à elle-même. Pas mal de mesures ont été prises visant l’amélioration de la situation, mais elles sont toutes restées sur papier sans pouvoir atterrir dans la vie quotidienne de la population.
Faut-il vraiment préciser les principales limites de la démocratie en Haïti, où les partis opposants ont utilisé la démocratie sans garder la limite et le respect des autres ? La démocratie vise au comportement – elle exige la jouissance d’un ensemble complet de droits civils, sociaux et politiques. Voilà en quelques sottes ce qui constitue la pierre angulaire de la citoyenneté : le droit de choisir un leader, le droit d’expression, ces droits ne peuvent être refusés à aucun individu n’importe le rang ou la classe à laquelle il appartienne. A cause de la conquête des droits liés à la citoyenneté, au cours des trois dernières décennies le peuple haïtien a acquis une conscience politique qui lui est sienne et irréversible, et que personne ne peut lui enlever. Mais quand le droit du peuple n’est pas démocratiquement respecté, il y aura toujours une lutte contre le fonctionnement du gouvernement en place, soit pour le renverser, soit pour réclamer son droit. Et en Haïti le gouvernement et les partis politiques d’opposition ne maintiennent pas la démocratie, tout ce qu’ils font n’est que pour défendre leurs propres intérêts alors que la situation de la population reste critique.
Que de tatonnements dans beaucoup de pays . Au regard de ce tableau, disons tout de go que les faits et le temps sont en train de donner raison a cette declaration . Il est vrai que la déclaration de Jacques Chirac avait été perçue, à l’époque, comme une injure aux Etats africains. Certains estimant qu’il les infantilisait. Comme d’habitude, l’on n’a pas pris du recul pour analyser, avant de lui envoyer des « flèches », des réponses cinglantes. Alors que c’est probablement, après analyse, que Chirac a estimé qu’il fallait aller progressivement, vers la démocratie en Afrique. Mais, comme on ne donne pas souvent le choix aux pays sous-développés, supposant la plupart du temps, qu’on sait ce qui est bon pour eux, depuis des bureaux climatisés à mille lieux, on leur a imposé, de façon unilatérale, la démocratie (système qui se veut pourtant de consensus et participatif). Mais, entre nous, Chirac n’avait-il pas vraiment raison ?
Fallait-il croire qu’il sera facile, juste à travers une déclaration ou une volonté des bailleurs de fonds, de changer la façon de gouverner en Haiti tout d’un coup, comme avec une baguette magique ? Et cela, sans un travail préalable ?
Avec cette vision, disons que l’échec de la démocratie sera à l’image de celle de tous ces politiques et programmes imposés aux pays pauvres , sans se préoccuper de leur consentement, ni de leur culture…, croyant que cela suffira pour leur développement et l’épanouissement de leur population. En tous les cas, Mélégué Traoré, ancien président de l’Assemblée nationale burkinabè et spécialiste des questions internationales, pense qu’il faut relativiser, car il est bien vrai que : « La démocratie peut créer les conditions pour le bonheur des populations, leur prospérité, leur bien-être, etc. J’entends quelquefois dire que, et on le lit souvent, la démocratie assure le développement.
C’est de la rigolade. Il y a plein d’exemples historiques qui contredisent cette assertion. L’Espagne s’est industrialisée sous Franco, le Brésil, sous les généraux. La Corée du Sud s’est développée sous une dictature féroce, Taïwan l’a été avec un régime autocratique, de parti unique, c’est pareil aujourd’hui pour la Chine populaire. Il n’y a pas de relation automatique. J’ai été au Vietnam ces derniers temps : c’est le régime du parti unique. Le représentant du Fonds monétaire international (FMI) à Hanoï m’expliquait qu’ils sont, eux-mêmes, surpris du dynamisme d’un pays qui est sorti de la guerre et devenu aujourd’hui un grand exportateur mondial du riz. Le revenu par tête d’habitant est passé, en une décennie, de 100 dollars à 1100 dollars. Comme quoi, il faut que les analystes soient plus lucides et qu’on ne prête pas à la démocratie libérale, des vertus qu’elle n’a pas toujours ». Que faire donc pour Haiti ? Faut-il revoir l’option de la démocratie en Haiti ? S’est-on précipité ? S’est-on trompé ? Qui a trompé qui ?
« la finalité pour nous Africains, ce n’est pas la démocratie. La démocratie n’est qu’un moyen, une étape. Ce que nous visons, c’est que le pays se développe, que les Haitiens soient heureux, qu’ils vivent bien. C’est ça l’objectif. La démocratie, c’est l’un des moyens et non la finalité ». Comme on le voit, il faut revoir le concept de la démocratie, en fonction de l’histoire des peuples, de leurs aspirations, etc. Il est aberrant et les “intégristes” de la démocratie devraient le savoir, sauf hypocrisie, que l’on ne peut pas parler et pratiquer la démocratie dans des Etats qui n’ont que 60 ans « d’indépendance », quand on sait que l’Europe, par exemple, a pris des siècles pour façonner son système politique et économique. Et rien que dans les années 40, l’Europe a connu les pires dictatures de la planète avec le nazisme et le fascisme.
En Haïti plus d’un tiers des enfants sont non scolarisés. Le gouvernement manque la capacité et la volonté pour s’engager dans une politique de lutte contre la misère. Le soutien le plus fort dont la société civile haïtienne a besoin de la communauté internationale est celui dirigée à fournir dans le statut de bien public une éducation qui
l’Etat n’a pas pu jusqu’à date installer dans le pays. Mais la question du rôle de la société civile haïtienne face à une crise humanitaire est trop complexe. Il va falloir une lutte pour le contrôle de l’hégémonie, soit pour un changement logique et distributif des ressources dont à présent est un défi. On a bien vu que les motifs des acteurs
politiques du pays depuis sont uniformes, alors il faut strictement conceptualiser la société civile stratégiquement comme un espace compétitif. Cela nécessitera que les acteurs politiques de la société civile Haïti œuvrent pour une société démocratique.
Sans oublier que les femmes n’ont eu le droit de vote sur le vieux continent qu’après la seconde guerre mondiale. Comme quoi, la démocratie est le résultat des choix et des expériences de chaque peuple. C’est une longue quête qui ne saurait être imposée par qui que ce soit, à un peuple.