L’accord politique pour une gouvernance apaisée » a été publié par l’exécutif dans un numéro spécial du journal officiel de la République d’Haïti, Le Moniteur, le vendredi 17 septembre 2021. Il est signé par le Premier ministre Ariel Henry, des figures connues de l’ancienne opposition au président Jovenel Moïse et d’illustres inconnus. L’accord compte huit sections qui vont de la gouvernance, des mécanismes de celle-ci aux dispositions générales.
Gouvernance de la période intérimaire
À la section 1, traitant de la gouvernance de la période intérimaire, l’article 1er stipule que « le présent accord est conclu en vue de créer un environnement sûr et stable, propice pour une gouvernance apaisée de la période intérimaire et d’organiser des élections inclusives, transparentes et impartiales devant conduire au retour à un fonctionnement normal des institutions démocratiques ». L’article 3 indique que « dans la huitaine suivant la signature de l’accord, un gouvernement sera constitué par le Premier ministre en concertation avec les forces politiques et sociales signataires des présentes ».
L’accord précise, toujours dans cette section, que les personnalités désignées comme membres de ce gouvernement intérimaire « doivent jouir d’une bonne réputation » et doivent être non partisans. « Le Premier ministre Ariel Henry est le chef du gouvernement et préside le Conseil des ministres jusqu’à la prise de fonction des nouveaux élus et la désignation d’un nouveau gouvernement », selon l’article 6 dudit accord.
Quid de ACS
« L’accord politique pour une gouvernance apaisée », dans sa section II traitant de l’autorité de contrôle et de suivi (ACS), crée, selon l’article 8, “une Autorité de contrôle et de suivi de la mise en œuvre de l’accord. Cet organe est constitué de vingt-trois membres bénévoles, désignés par les organisations mentionnées ci-dessous, auxquels s’adjoignent les sénateurs en fonction. Elle a pour mission de contrôler l’action gouvernementale et de veiller à la bonne exécution des dispositions du présent accord.»
Cette autorité de contrôle qui n’est pas un Parlement et qui n’a pas la prérogative de renvoyer les membres du gouvernement, est composée, selon l’article 9, d’un membre de l’Ordre des comptables professionnels agréés (OCPAH), d’un membre du collège des ingénieurs et architectes haïtiens; d’un membre de l’association médicale haïtienne, de dix membres des chambres de commerce départementales, de dix membres des universités publiques en région. « Le gouvernement, selon l’article 10, sollicite a priori l’avis favorable de l’Autorité de contrôle et de suivi sur tout décret ayant force de loi devant être adopté en conseil des ministres. Son avis défavorable doit être motivé et requiert une majorité de deux 2/3 ; son président a droit de vote et sa voix est prépondérante en cas d’égalité de voix ».
Cette autorité se réunira tous les deux mois pour des sessions de 10 jours, en vue de faire le point avec les membres du gouvernement sur la réalisation et les tâches prévues dans sa mission, ou sur convocation du Premier ministre, lit-on dans cet accord qui prévoit des « frais » pour les membres de cette autorité.
Mission du gouvernement
La section III de cet accord qui traite de « la mission du gouvernement » est composée de 25 points. Parmi ces 25 points, le gouvernement se propose, au point I, de « restaurer l’autorité de l’État et créer un climat sécuritaire pour ramener la paix et la confiance de la population » ; renforcer les forces de sécurité nationale, la PNH, les FAD’H et les services de renseignements et d’intelligence; créer un espace de dialogue permanent pour aborder les questions d’intéret national, « dans le cadre de conférences nationales »; revoir les décrets pris par l’ancienne administration en consultation avec l’ACS; renforcer la coordination des réponses humanitaires et initier la reconstruction du grand Sud dévasté, par le séisme du 14 août; garantir une distribution saine de la justice et s’assurer de l’avancement des dossiers relatifs aux crimes de sang, entre autres, l’assassinat du batonnier de l’ordre des avocats de Port-au-Prince Monferrier Dorval et du président Jovenel Moïse, les massacres dans les quartiers populaires; veiller à l’avancement des dossiers relatifs aux crimes finanicers en général perpétrés sous les administrations antérieures et au dossier PetroCaribe en particulier; réaliser l’audit de l’administration publique, plus spécialement des organismes autonomes à caractère financier de l’État. Le point 25 indique que le gouvernement doit « créer les conditions pour la tenue des élections générales au plus tard à la fin de l’année 2022 sous l’empire de la nouvelle constitution et l’installation des élus légitimes au début de l’année 2023 ».
Sécurité du territoire, création d’une unité antiterroriste
La section IV traitant de la sécurité sur le territoire national soutient, en son article 13, que « l’exécutif prend toutes les dispositions pour permettre aux forces de sécurité nationale de rétablir la paix civile sur le territoire en : a) mettant tout en oeuvre pour éliminer les gangs, rétablir la libre circulation des personnes et des biens, contrôler le trafic d’armes et de munitions. Il est prévu la création d’une “unité antiterroriste avec tous les moyens nécessaires, capable d’intervenir sur toute l’étendue du territoire national ». Il est également prévu la création d’un conseil de sécurité nationale.
CEP, un nouveau Conseil selon l’esprit de l’article 289
La section V qui touche le Conseil électoral provisoire (CEP) stipule, en son article 14, environ une semaine après l’installation du nouveau cabinet ministériel, il est créé, suivant l’esprit de l’article 289 de la Constitution, un organe électoral avec les représentants issus des secteurs suivants : la Conférence épiscopale d’Haïti (CEH) et l’Église épiscopale, les cultes réformés, le secteur vodou, les associations de patrons de presse (ANMH et AMI), les organisations des droits humains, la Conférence des recteurs d’université; les organisations paysannes, la diaspora.
En cas de désistement ou d’incapacité de l’un des secteurs mentionnés, le gouvernement pourvoit à sa défaillance, lit-on dans cet article qui confie la tâche d’organiser les élections en toute transparence au CEP.
Réforme constitutionnelle, modalités de la formation d’une assemblée constituante
La section VI traite de la réforme constitutionnelle. Selon l’article 17, « il est formé une assemblée constituante de 33 membres issus de la Fédération des barreaux d’Haïti (3) dont au moins 1 femme ; de la Corpuha (3), dont au moins 1 femme ; de chaire Louis Joseph Janvier (1) ; représentation départementale (10), dont au moins 3 femmes ; diaspora (2), dont au moins une femme ; secteur jeune (1) ; secteur femme (1) ; du secteur culturel (1) ; du Comité olympique (1) ; secteur paysan (1) ; personnes en situation de handicap (1) ; du pouvoir exécuitif (4), dont au moins 2 femmes; partis politiques signataires de l’accord (4) dont au moins 2 femmes ».
L’article 18 indique que « la mission de l’Assemblée constituante est de : prendre en compte les travaux déjà réalisés sur la question constitutionnelle et préparer un texte constitutionnel, en respectant le caractère libéral et démocratique de la Constitution de 1987 » ; de « convoquer des assises au niveau de tous les arrondissements en vue de faire la promotion du nouveau projet de constitution et de construire un large consensus autour des options et changements proposés » ; de « transmettre le projet de la nouvelle constitution au gouvernement dans un délai ne dépassant pas trois mois pour sa ratification par le peuple haïtien ».
Evaluation du système d’enregistrement des citoyens et citoyennes
La section VII de l’accord dispose de l’évaluation du système d’enregistrement des citoyennes et des citoyens. Selon l’article 19, « le gouvernement met en place une commission d’experts chargée d’effectuer, dans la transparence, un audit du système d’enregistrement des citoyennes et des citoyens afin de vérifier la fiabilité du processus de fabrication et d’émission de cartes d’identification nationale. Cette commission devra soumettre au Premier ministre un rapport exhaustif avec des recommandations motivées sur la meilleure stratégie à adoper pour crédibiliser le processus d’identification des citoyens.»
Sur la base de ces recommandations, un délai suffisant sera accordé pour permettre à un maximum de citoyens en âge de voter d’être identifiés par l’ONI et de figurer dans le registre électoral, lit-on dans cet accord qui a des dispositions générales et des dispositions finales. Les membres du gouvernement, secrétaires d’État, directeurs généraux, membres de collectivités territoriales qui veulent briguer un poste électif doivent démissionner 30 jours après la mise en place du CEP, selon cet accord signé par le Premier ministre Ariel Henry pour l’exécutif, le Parti Fusion des sociaux-démocrates (FUSION), Force Louverturienne, Secteur démocratique et populaire (SDP) Vérité, Veye Yo, Inite/Dirph, PEN, Inifos, Groupe des partis pour l’alternative, Ansan m nou fò ; Ranfo, FOPADAH, Operasyon Tèt Ansanm, MDH ont signé cet accord. Il y a plus de trois cents signataires. Des figures connues et beaucoup d’illustres inconnues.