Centrale de production d’électricité dans laquelle le flux créé par l’eau amenée par écoulement libre (canaux) ou par des conduites en charge (conduites forcées) actionne la rotation des turboalternateurs, avant de retourner à la rivière comme débit turbiné. C’est une forme d’énergie renouvelable, propre et non polluante.
Une centrale hydroélectrique transforme l’énergie sauvage d’une chute d’eau en énergie mécanique grâce à une turbine, puis en énergie électrique grâce à un générateur.Deux types d’installations existent à travers le monde :
Les installations qui fonctionnent par éclusées, c’est-à-dire de grands barrages dotés de réservoirs permettant de répondre aux pointes de consommation, comme l’Hydro-Québec .Les centrales installées au fil de l’eau, ce qui est le cas de la Centrale hydroélectrique de Péligre.
Quelques détails techniques sur la centrale de Péligre:A 52 kilomètres de Port-au-Prince, en suivant la route nationale no 3 , soit à 9 kilomètres de Mirebalais , se dressent la centrale de Péligre et son barrage.Le barrage est pourvu de sept vannes dont trois évacuateurs de crue et quatre vannes de chasses.C’est une centrale de moyenne chute. Elle est d’une hauteur de 172 m par rapport au niveau de la mer.
Type: fil de l’eau, Nombre de groupes : 3 ;Hauteur de chute maximale du barrage : 172.00 mètres par rapport au niveau de la mer. Mise en service: Juillet 1971; Système hydrique: Fleuve de l’artibonite; Débit moyen du lac: 70.00 m3/s ,Superficie: N/A
Système hydrique: Ensemble constitué par un cours d’eau, ou plusieurs cours d’eau reliés entre eux, et les ouvrages de génie civil qui y sont mis en place en vue d’agir sur les apports naturels en eau pour des fins d’utilisation ou de régulation de l’eau.
Trois types de turbines sont utilisés à travers le monde : Kaplan pour les basses chutes (5-10 m), Francis pour les chutes moyennes (10-100 m) et Francis et Pelton pour les hautes chutes (50 à 400 m).
Les centrales de basse chute consistent en un seuil qui dérive l’eau dans un canal d’amenée qui la conduit à la centrale. La restitution de l’eau se fait en aval dans le canal de fuite qui rejoint le cours d’eau dérivé.
Les centrales de haute chute sont dotées d’une prise d’eau en montagne et d’une conduite forcée qui amène l’eau à la centrale puis la restitue.La centrale de Péligre est dotée de trois turbines d’une capacité de 15,5 Mw chacune. Ces turbines de type francis ont été installées par une compagnie italienne. On peut dire que la centrale a une capacité moyenne de 45 MW. A l’inauguration de Péligre en juillet 1971, la consommation énergétique de la zone métropolitaine incluant Léogane, Croix-des-Bouquets était de 12 Mw en pointe . La demande a pris moins de 15 ans pour quadrupler, soit une augmentation de plus de 120 % en dix ans.L’exode rural et l’expansion anarchique de Port-au-Prince, la multiplication des bidonvilles dans les périphéries de Port-au-Prince sont les principales causes qui ont occasionné le rationnement de l’électricité et la non-rentabilité de l’entreprise vers les années 1986, après le départ de Jean-Claude Duvalier. A mesure que la population de Port-au-Prince augmentait, la fraude et les « comberlandes » devenaient importantes . Vers l’année 1987 sur chaque kilowatt produit, 40 % était une perte sans compter des arriérés ou escrocs qui dépassaient plus de 15 % .. Alors, l’Electricité d’Haiti n’était plus une entreprise rentable après 1986.
J’ai participé à la gestion de la centrale de Péligre et de la zone métropolitaine pendant plus d’une décennie entre 1982 -1994. On utilisait la centrale de Péligre de façon optimale en saison humide. En 1986, la demande de la zone métropolitaine passait à 95 Mw. Malgré la construction de deux autres centrales thermiques utilisant le mazout et le diesel: Varreux et Carrefour; 21 et 30 Mw respectivement, la demande n’a pas cessé de galoper; cette escalade a continué de façon vertigineuse…
D’autres facteurs, l’arrivée des bateaux « Pèpè » ont contribué également à l’effondrement de l’électricité d’Haiti. Tout le monde pouvait se procurer d’un téléviseur, d’un fer à repasser ou d’un micro-onde (micro-wave) en provenance de l’étranger . Autant de facteurs qui ont contribué à d’énormes pertes en énergie dans la distribution du courant aux usagers. L’utilisation des conducteurs inappropriés et la carence d’infrastructures électriques en place pour faire face à la demande en sont d’autres exemples…Il nous faut un renforcement des institutions en Haiti, la création des garde-fous qui puissent garantir le fonctionnement des institutions autonomes comme l’Ed’h, avant de penser à un projet d’électrification rentable en Haïti.
La partie ouset du batiment où se trouvent les turbines
Dans tous les pays, l’Etat est un mauvais gestionnaire… Si l’on veut vraiment attirer des investisseurs en Haïti, l’électricité est le secteur le plus important que le gouvernement haïtien doit prioriser, cela aiderait tout aussi bien à une décentralisation. La privatisation n’est pas possible tant que l’autorité de l’Etat haitien ne soit pas renforcée. l’Etat haïtien ne prend pas des mesures adéquates pouvant garantir un vrai fonctionnement des institutions… Dans un pays où l’Etat est absent, on ne peut avoir une institution autonome comme l’Ed’h de survivre. On utilise tous les voies et moyens pour avoir de l’électricité même à l’aide d’un fil de fer barbelé.
Je me rappelle qu’en 1986 que le fils d’un des plus riches industriels haïtiens avait perdu sa vie en tentant de connecter “une “comberlande” sur la cour de la Hasco à une heure avancée de la nuit. Parfois ceux qui peuvent payer la facture utilisent les fraudes ou ne paient pas…
Dans tous les pays, on doit nécessairement avoir une capacité de production double par rapport à la demande pour palier aux déficiences mécaniques, techniques de la machinerie électrique et pour permettre une maintenance préventive,indispensable à la durée de toute centrale. Tout comme le moteur d’un véhicule, l’entretien est vital. En Haïti on n’a jamais eu la chance d’avoir une production supérieure à la demande. Et les génératrices ne bénéficient d’aucun maintien préventif en raison de l’insuffisance de la production et de l’absence de profitabilité pour l’approvisionement en pièces de rechange.
En Haiti, il y a deux saisons : la saison sèche et la période humide. Cette dernière étant la saison de la pluie, commence à partir de la mi-mai pour prendre fin au mois d’Octobre, Les pluies, mesurables au moyen de la pluviométrie, durant cette période facilitent le remplissage du barrage d’une hauteur de 172 mètres par rapport au niveau de la mer. Les arbres, les plantes et les herbes représentent une bonne couverture, ils ralentissent l’écoulement des eaux des pluies dans lesnappes aquifères, les mers et les rivières. Si ce tampon protecteur disparaît, le sol n’a plus de protection contre les pluies et est tout bonnement charrié vers les mers et cours d’eau (sédimentation) causant bien souvent des inondations massives de boue.
Une deuxième implication dans les problèmes d’environnement du pays. Un barrage est une cuvette, plus le niveau d’eau est haut, plus le débit est fort pour produire et turbiner. Cependant, l’érosion accrue de l’environnement du lac dû à la coupe de bois continue, un phénomène qui s’est aggravée au fil des ans, a engendré le phénomène de sédimentation à un rythme accéléré, un problème néfaste à la durée du Lac. La sédimentation résulte de l’ensablement du barrage en saison humide. C’est un phénomène qui se produit en raison du déboisement dans la zone du barrage. Effet : une dégradation des terres vers le barrage pendant les pluies diluviennes. Comme conséquence négative, nous enregistrons une évaporation rapide du lac en période sèche et une réduction significative du volume de contenance causée par les alluvions et des sédiments qui continuent à s’entreposer tout au long du barrage à un rythme accéléré.
La conduite forcée des turbines est située entre 153 mètres et 172 Mètres, c’est-à-dire le niveau minimal exploitable du lac pour tourner les turbines est de 153 mètres. On peut toujours utiliser le lac pour l’irrigation en ouvrant les portes ou les vannes-secteurs. Autre point à signaler, en période sèche on peut seulement utiliser une turbine, parce qu’il n’y a pas d’apport-amont significatif pour une gestion à court terme du niveau d’eau restant. Le taux de sédimentation étant élevé et l’évaporation du lac du fait du manque de couverture en bois dans les périphéries ne permettent pas une utilisation effective de la centrale en période sèche (Nov-Mai ).
Par ailleurs, on ne peut pas augmenter d’autres turbines, pour une plus grande capacité, comme l’a souligné un intervenant… Parce que toute tentative d’augmentation de débit ne serait pas rentable et causerait des inondations en aval du barrage, dans les petits canaux déversoirs. Et les canaux en aval ne supportent pas plus de 70m3/s d’eau .De tels projets sont réalisables seulement avec d’autres micros-barrages en aval ou l’implantation des déversoirs et des évacuateurs de crue en aval tout le long des canaux , c’est-à-dire d’autre ouvrage par lequel s’écoule le trop-plein des canaux. Une couverture forestière aux alentours du lac de Péligre s’avère nécessaire sinon même la vallée de l’artibonite et le bas plateau central et la plaine de l’ODVA seront affectés. De tels projets coûteraient beaucoup plus que le coût actuel de la centrale.
Le reboisement représente la première étape pour un sauvetage du barrage. On pourrait tenter d’implanter des micro-centrales hydro-électriques en aval de Péligre comme celle de Drouet non loin de Pont Sondé désservant les villes des Gonaives, Sain-Marc et l’Estère en période humide. On ne connait pas le rythme du déboisement actuel dans un pays en déliquescence institutionnelle. Existent-ils des Agents forestiers en Haïti ?
Nous devons penser à développer d’autres types d’énergies renouvelables:
– Vent : éolienne, houlomotrice.
– Soleil : thermique, photovoltaïque, thermodynamique.
– Chaleur terrestre : géothermie.
– Eau : hydroélectrique, marémotrice.
– Biodégradation : biomasse.
– Biocarburant.
Les énergies renouvelables sont ainsi multiples et fondamentalement diverses par leurs mécanismes physiques, chimiques ou biologiques.
Elles constituent un ensemble de filières diversifiées dont la mise en oeuvre n’entraîne en aucune façon l’extinction de la ressource initiale, et qui est renouvelable à l’échelle humaine.
Pour finir, je dis que lorsqu’on navigue sur Haiti à l’aide d’imageries satellitaires, la Grand’Anse reste aujourd’hui le seul coin vert d’Haiti. Tous les bassins versants présentent des signes avants-coureurs qui ne semblent intéresser nullement les gens aux commandes de l’Etat. Haiti vit l’imminence d’une catatrophe écologique irrémédiable à cause du laxisme des autorités. Je souhaite que le gouvernement haitien prenne des mesures drastiques en vue de stopper le déboisement de la forêt des Pins, un fait qui a été déja signalé par les médias. Le réseau de transport et de distribution haïtien n’est pas intégré sauf à Port-au-Prince où il existe une ceinture de 69 kv,raccordant les différentes sous-stations de distribution. L’essentiel du réseau de distribution intégré se trouve dans la région de Port-au-Prince, alors que des réseaux de distribution locaux desservent des localités avoisinant de petites centrales avec une tension de transport de 12,47 kv ou 2,4 kv. Sur ses 1 500 Km environ de lignes à moyenne et basse tension, 620 Km sont situées dans la région de la capitale et plus de 1 100 Km s’étendent sur l’axe Port-au-Prince / St-Marc / Gonaïves / Cap-Haïtien, les Cayes, Miragoâne, Petit-Goâve où se concentre plus de 80 % de la clientèle d’EDH. L’unique ligne à haute tension du réseau est celle qui relie la centrale hydroélectrique de Péligre à Port-au-Prince (115 kV, 69 Kv), tandis que la majeure partie des autres lignes de transport fonctionne à 69 et 12,47 kV dans la zone métropolitaine. Des 175 000 clients officiels d’EDH, plus du quart était considéré comme inactif, c’est-à-dire débranché ou déconnecté. Environ 125 000 consommateurs, dont 450 petites industries alimentées en moyenne tension, constituent la clientèle d’EDH. (1994-2000)
Il faut éviter de répéter les erreurs de nos politiciens en cachant les vraies causes du blackout. La nation doit savoir que pour faire disparaître le blackout, il faudra entamer une révolution énergétique qui prendra au moins une décennie pour apprécier les impacts positifs de façon substantielle. Malheureusement, une telle décision doit passer par la politique, dans un cadre économique bien défini, avec des leaders et exécuteurs techniques qualifiés en la matière. Pour électrifier plus de 90% de la Jamaïque, près de cinq milliards de dollars américains furent nécessaires pour l’expansion des infrastructures de leur réseau électrique national. Considérant qu’Haïti est environ trois fois plus grande que la Jamaïque et l’état délabré de notre réseau électrique actuel, il nous faudra près de dix ans avec un budget avoisinant les vingt milliards de dollars américains pour électrifier notre portion de l’île, à plus de 95%. Ces chiffres sont loin d’être une exagération, quand on analyse froidement les résultats concrets obtenus en Haïti, après avoir dépensé près de quatre milliards de dollars des fonds du projet de PétroCaribe.
Une attitude patriotique et responsable
Au lieu de passer le temps à se questionner sur la bonne volonté de nos dirigeants qui remplacent leurs anciennes promesses non tenues avec de nouvelles promesses plus créatives, il convient d’éduquer et d’inviter le peuple à jouer un rôle important dans la révolution énergétique. Si, aujourd’hui, il est la première victime, demain, sans doute, le peuple deviendra le principal bénéficiaire de cette transformation énergétique. Certes, la majorité de la population haïtienne est déjà trop pauvre pour se payer le kilowatt/heure, même à vingt-cinq centimes de dollars ou vingt-cinq gourdes. Les vingt heures de courant électrique, soit six cents gourdes dépasseraient largement le salaire minimum de cinq cents gourdes en Haïti. Voilà pourquoi on devrait plutôt parler d’une révolution énergétique qui ferait partie d’un plan macro-économique visant à l’amélioration des conditions de vie du citoyen haïtien.
Toutefois, rappelons que l’accès à l’eau potable est un droit que tout citoyen peut exiger de ses dirigeants. Quant au courant électrique, l’approche doit être pareille à la technologie. Il s’agit d’un privilège que le citoyen ou la citoyenne doit pouvoir se payer. Et quiconque croit encore que le gouvernement en place, dans les conditions politiques et économiques actuelles, ou que l’État haïtien, longtemps en faillite, doit lui garantir l’accès au courant électrique 24 sur 24 gratuitement, vit encore dans le pire blackout.