Sous le régime d’occupation militaire étrangère, paradoxalement, le processus de centralisation et de modernisation aboutit rapidement à la constitution du monopole de la contrainte physique légitime et de celui de la fiscalité. Ainsi donc, pour la première fois depuis l’indépendance du pays en 1804, l’État haïtien parvint à occuper, à contrôler, à pouvoir défendre et tenter d’organiser son espace territorial. L’image de cet État centralisateur, institutionnalisé, qui surveillait et punissait, qui semblait jouir de la souveraineté interne et externe et qui n’avait à craindre aucune menace, aucune attaque venant de l’extérieur, pourrait laisser croire que l’État haïtien à cette époque était un véritable État moderne. En réalité, c’était une institution mineure, qui se trouvait sous la protection de l’Aigle, et qui risquait d’être étouffée durant la régence qui allait durer 19 ans.
27Si la centralisation du pouvoir et la modernisation de l’administration publique étaient indispensables à la stabilité politique du pays et permettaient à l’État haïtien d’extraire les ressources nécessaires à son budget de fonctionnement et d’investissements et au paiement de ses dettes interne et externe, il est à souligner aussi qu’elles s’inscrivaient dans la stratégie de l’occupant visant à déplacer les capitaux européens au profit de ceux de ses propres ressortissants. En 1918, le président Dartiguenave déclara la guerre à l’Allemagne, confisqua les biens des sujets allemands établis en Haïti et emprisonna un certain nombre d’entre eux. Après la guerre, beaucoup de commerçants et hommes d’affaires allemands furent expulsés du pays. L’occupation américaine mit fin aussi à la position privilégiée qu’occupait la France dans ses relations commerciales avec Haïti. Ainsi, le champ était libre à la pénétration économique américaine.
L’appareil répressif de l’État était constitué par les troupes d’infanterie de la Marine de guerre des États-Unis d’Amérique et la gendarmerie haïtienne. Mais la hiérarchie était assurée par des officiers supérieurs américains. Les succès de la gendarmerie dans l’anéantissement de la résistance militaire des Cacos furent essentiellement l’œuvre des marines qui disposaient d’un armement sophistiqué, faisant de l’intervention militaire américaine en Haïti l’une des plus meurtrières de la région. L’article X de la Convention prévoyait la création d’une gendarmerie efficace, rurale et urbaine, sous la direction d’officiers américains nommés par le président d’Haïti sur la proposition du président des États-Unis. Il affirmait textuellement :
Ils (les officiers américains) seront remplacés par des Haïtiens, lorsque ceux-ci, après un examen effectué par un comité choisi par l’officier supérieur chargé de l’organisation de la gendarmerie, en présence d’un délégué du gouvernement haïtien, seront jugés aptes à remplir convenablement leurs fonctions.
En outre, l’article XI stipulait :
Le gouvernement d’Haïti convient de ne céder aucune partie du territoire de la République d’Haïti par vente, bail ou autrement, ni de conférer juridiction sur son territoire à aucune puissance ou gouvernement étranger, ni de signer avec aucune puissance aucun traité ni contrat qui diminuerait ou tendrait à diminuer l’indépendance d’Haïti.
L’article VIII faisait obligation à l’État haïtien de ne contracter aucune dette sans l’accord préalable du président des États-Unis. La contrepartie américaine était très significative à ce sujet. Selon l’article XIV, les États-Unis d’Amérique s’engageaient, le cas échéant, « à prêter leur aide efficace pour la préservation de l’indépendance haïtienne et pour le maintien d’un gouvernement capable de protéger la vie, la propriété et la liberté individuelle ». Ils devaient aussi, au regard de l’article XIII, aider Haïti à exploiter ses ressources naturelles et à développer un service sanitaire adéquat. Donc, on ne pouvait parler ni de souveraineté interne ni de souveraineté externe dans le cadre d’un régime d’occupation militaire étrangère.
Le poids de la force d’occupation était encore beaucoup plus significatif sur le plan de l’administration publique. À côté du haut-commissaire qui supervisait les ministères de Santé publique, des Finances, de l’Agriculture et des Travaux publics, deux autres fonctionnaires américains, le receveur général et le conseiller financier, tous deux militaires, détenaient des pouvoirs très étendus. Le président haïtien lui-même leur devait obéissance, sous peine de subir des sanctions pouvant aller jusqu’à la suspension de sa paye. La perception des droits de douanes, la gestion des dépenses publiques, l’application des dispositions relatives aux importations et aux exportations, relevaient de la compétence du receveur général. Toute modification du tarif douanier, en cas de diminution des revenus de l’État, ne devait s’effectuer qu’avec l’autorisation du président des États-Unis d’Amérique, selon l’article IX. Le conseiller financier, quant à lui, en tant qu’assesseur technique du ministre des Finances, était chargé de veiller à l’équilibre budgétaire, de promouvoir une politique d’augmentation des recettes fiscales, de superviser l’évolution de la dette publique et de faire les recommandations qu’il jugeait utiles, comme le prévoyaient les articles II et III de la Convention.
La nature de l’État haïtien était le reflet de la nature de ses rapports avec la puissance occupante. Celle-ci s’était révélée au grand jour lorsque, au cours de sa campagne électorale en 1920, Franklin Delano Roosevelt, sous-secrétaire de la Marine, se laissa aller jusqu’à affirmer : « Vous devez savoir que j’ai participé dans l’administration de deux petites républiques. En réalité, j’ai écrit moi-même personnellement la Constitution d’Haïti et si vous le permettez, je vous dirai que c’est une très bonne Constitution. » On pourrait dire qu’Haïti était un appendice des États-Unis d’Amérique, le palais présidentiel une simple annexe du département d’État américain. L’État haïtien était tout simplement un État vassal, sans souveraineté et dont les structures sociale et économique demeuraient archaïques et arriérées. Comment l’occupant allait-il s’y prendre pour les moderniser ?
Extrait : L’égnime Haitienne (Dr Sauveur Pierre Etienne)
2 Voir à ce sujet WEINSTEIN, Brian et SEGAL, Aaron, Haiti : The Failure of Politics, New York/Londres, Praeger, 1992, p. 26-27.
3 Voir MANIGAT, Leslie F., Éventail d’Histoire vivante d’Haïti. La crise du dépérissement de la société traditionnelle haïtienne (1896-2003), t. III, Port-au-Prince, collection du CHUDAC, Média-Texte, 2003, p. 63.
4 Voir MARTIN, John Bartlow, U. S. Policy in the Caribbean. A Twentieth Century Fund Essay, Boulder, Westview Press, 1978, p. 27-28.
5 GAILLARD, Roger, La République exterminatrice. La guerre civile, une option dramatique (15 juillet-31 décembre 1902), t. IV, Port-au-Prince, Le Natal, 1993.
6 Lors de la crise de 1902 qui dégénéra en guerre civile, une très large partie des élites politiques du pays n’éprouva aucune gêne à s’allier aux militaires contre l’avènement d’Anténor Firmin à la présidence de la République. Les élites politiques manifestaient une hostilité telle contre les gens cultivés que le journal La Tribune Populaire du 27 juin 1902 s’était permis d’écrire : « M. Firmin est à ce point instruit qu’il ne doit pas être président d’Haïti, notre pays étant trop peu avancé pour être gouverné par un tel homme ! » Et l’historien Roger Gaillard qualifia la défaite politique de Firmin de « déroute de l’intelligence ».
7 Voir GAILLARD, Roger, La République exterminatrice. Le grand fauve (1902-1908), t. V, ibid.
8 GAILLARD, Roger, La République exterminatrice. La déroute de l’intelligence (mai-juillet 1902), t. III, ibid., 1992.
9 Voir JOACHIM, Benoît B., Les racines du sous-développement en Haïti, op. cit., p. 215.
10 L’application de la doctrine de Monroe dans la région de la Caraïbe est partie de cette alliance. À ce sujet, le président Taft affirma : « It is therefore essential that the countries within that sphere shall be removed from the jeopardy involved by heavy foreign debt and chaotic national finances and from the ever-present danger of international complications due to disorder at home. Hence the United States has been glad to encourage and support American bankers who where willing to lend a hand to the financial rehabilitation of such countries… » Cité dans WEINBERG, Albert K., Manifest Destiny : A Study of Nationalist Expansionism in American History, Chicago, Quadrangle Books, 1963 (1935), p. 432.
11 Le peuple haïtien était divisé en « une masse amorphe, politiquement et économiquement asservie par une minorité dont l’idéal le plus élevé est de vivre aux dépens de la plèbe sans aller plus outre ». Voir PRICE-MARS, Jean, La vocation de l’élite, Port-au-Prince, Chenet, 1919, p. 32.
12 Voir le chapitre V.
13 La chute du président Antoine Simon en août 1911 donna lieu à une période d’instabilité politique chronique au cours de laquelle six chefs d’État se sont succédé en quatre ans, 1911-1915, dont quatre durant les deux dernières années ayant précédé l’intervention militaire et l’occupation américaines. Voir NICHOLLS, David, From Dessalines to Duvalier. Race, Colour and National Independence in Haiti, Cambridge, Cambridge University Press, 1979, p. 142.
14 Voir WEINSTEIN, Brian et SEGAL, Aaron, Haiti: The Failure of Politics, op. cit., p. 27.
15 Voir NICHOLLS, David, From Dessalines to Duvalier, op. cit., p. 144.
16 À ce sujet, Weinstein et Segal écrivent: « Lester Langley points out that even before the war the U. S. navy was lobbying for an increased U. S. presence and warned about German expansionism in the West Indies. The navy had its own source of intelligence from its Caribbean Squadron, which had been created in 1902. » Voir WEINSTEIN, Brian et SEGAL, Aaron, op. cit., p. 28.
17 Les dirigeants américains le reconnaîtront par la suite et n’hésiteront pas à le clamer haut et fort. Dans son message annuel au Congrès, en date du 3 décembre 1912, le président William H. Taft déclara: « First, it is obvious that the Monroe doctrine is more vital in the neighborhood of the Panama Canal and the zone of the Caribbean than anywhere else. There, too, the maintenance of that doctrine falls most heavily upon the United States. » Et le secrétaire d’État Henry L. Stimson affirmera sans ambages en 1931: « That locality (Central America and the Caribbean) has been the one spot external to our shores which nature has decreed to be most vital to our national safety, not to mention our prosperity. » Voir GANTENBEIN, James W. (dir.), The Evolution of our Latin-American policy. A Documentary Record, New York, Octagon Books, 1971, p. 86 et 130.
18 Comme l’affirment Weinstein et Segal: « Intervention also sprang from a strong imperialist ideology that preceded, included, and followed Roosevelt in the administrations of McKinley, Taft, and Wilson. » Voir WEINSTEN, Brian et SEGAL, Aaron, op. cit., p. 27.
19 « If a nation shows that it knows how to act with reasonable efficiency and decency in social and political matters, if it keeps order and pays its obligations, it need fear no interference from the United States. Chronic wrongdoing, or an impotence which results in a general loosening of the ties of civilized society, may in America, as elsewhere, ultimately require intervention by some civilized nation, and in the Western Hemisphere the adherence of the United States to the Monroe Doctrine may force the United States, however reluctantly, in flagrant cases of such wrongdoing or impotence, to the exercise of an international police power. » Voir ROOSEVELT, Theodore, « FOURTH ANNUAL MESSAGE, WHITE HOUSE, December 6, 1904, To the Senate and House of Representatives », dans RICHARDSON, James D., Messages and Papers of the Presidents (11 volumes), vol. 9, New York, Trans-Media Publishing Company/Dobbs Ferry, 1985, p. 7053. Pour la traduction du passage cité, voir JULIEN, Claude, L’Empire américain, Paris, Grasset, 1968, p. 101.
20 À ce sujet John Bartlow Martin souligne: « Of 199 U. S. military hostilities abroad without a declaration of war between 1798 and 1972, no fewer than 81 took place in the Caribbean. » Voir MARTIN, John Bartlow,op. cit., p. 22-23.
21 Selon le secrétaire d’État américain Philander C. Knox, « The logic of political geography and of strategy, and now our tremendous national interest created by the Panama Canal, make the safety, the peace, and the prosperity of Central America and the zone of the Caribbean of paramount interest to the Government of the United States. Thus the malady of revolutions and financial collapse is most acute precisely in the region where it is most dangerous to us. It is here that we seek to apply a remedy. » Cité dans WEINBERG, Albert K., Manifest Destiny: A Study of Nationalist Expansionism in American History, op. cit., p. 432.
22 NICHOLLS, David, op. cit., p. 284.
23 Parlant du rôle du secrétaire d’État américain William Jennings Bryan dans les préparatifs de l’intervention militaire américaine en Haïti, John Bartlow Martin écrit: « Bryan was also involved with the problems presented by Haiti and the Dominican Republic. Then as now, Haiti, poor even by African or Asian standards, had been ravaged for years by violence, plunder, and assassination. The threat of European intervention was great; France and Germany were pressing for control of Haitian customs to service Haitian debts. Because Haiti lay athwart the strategic approaches to the Panama Canal, Bryan wanted a naval base in Haiti, but Haiti refused to sell us the necessary land. As war began in Europe, Bryan told Wilson that it was imperative that American bankers buy out European interests; however, because they would do so only if the U. S. government took over Haitian customs, he recommended sending Haiti an ultimatum backed up by a warship. Wilson approved. When a new wave of violence broke out in Haiti, the United States landed marines, settled down to a long occupation, and installed a pro-American regime that signed a treaty establishing a virtual U. S. protectorate over Haiti. The U. S. Senate concurred because of the war in Europe. » Voir MARTIN, John Bartlow, U. S. Policy in the Caribbean, op. cit., p. 21-22.
24 Cité dans NICHOLLS, David, From Dessalines to Duvalier, op. cit., p. 143.
25 SCHMIDT, Hans, The United States Occupation of Haiti, 1915-1934, New Brunswick, N. J., Rutgers University Press, 1971, p. 34-35.
26 NICHOLLS, David, op. cit.
27 À ce sujet, H. W. Furniss, le diplomate américain en poste à Port-au-Prince, avait déclaré au secrétaire d’État Philander Knox: « Everyone knows of the complicity of the German merchants in the Leconte revolution and they also know that the Germans financed the Simon revolution of 1908 and others before it, and doubtless will finance all those to follow. » Cité dans MUNRO, Dana Gardner, Intervention and Dollar Diplomacy in the Caribbean, 1900-1921, Princeton, Princeton University Press, 1964, p. 326.
28 Voir MARTIN, John Bartlow, op. cit., p. 5-6.
29 SCHMIDT, Hans, The United States Occupation of Haiti, 1915-1934, op. cit., p. 54.
30 À la veille de l’occupation, le montant total des investissements américains en Haïti s’élevait à plus de 15 000 000 dollars. Voir BUELL, Raymond Leslie, « The American Occupation of Haiti », Foreign Policy Association, Information Service, 27 novembre-12 décembre 1929, vol. 5, no 19-20, p. 341.
31 Le phénomène du faux altruisme caractérise la politique extérieure du Parti démocrate, tout au moins de Wilson à Carter. Sur la base de ce principe, les dirigeants américains justifient l’occupation d’un pays en prétextant qu’il s’agit d’aider un voisin pauvre à se relever ou, de façon moins bénévole, d’assumer le gouvernement d’un pays dont les nationaux avaient démontré leur incapacité à se gouverner euxmêmes. Voir NICHOLLS, David, Haití, c. 1870-1930, op. cit., p. 284.
32 Voir le chapitre précédent.
33 Le 25 août 1915, Charles Moravia écrivait dans son journal La Plume : « Nous ne sommes pas en guerre contre les États-Unis, nous sommes en guerre contre l’humanité, que nous avons offensée depuis un siècle. Les Américains sont ennemis du despotisme souverain, et, pour empêcher sa restauration, ils ont occupé le pays. » Cité dans CASTOR, Suzy, L’occupation américaine d’Haïti, op. cit., p. 75.
34 À ce sujet, Dantès Bellegarde écrit : « Seul un petit soldat obscur, Pierre Sully, se fit tuer, la carabine au poing, en défendant l’accès de son poste aux « marines » de l’amiral Caperton. Nul autre ne brigua « l’honneur d’une si belle mort ». Aussi personne n’a-t-il aujourd’hui le droit de jeter l’anathème aux autres puisque tous ont survécu à la honte. » Voir BELLEGARDE, Dantès, Pour une Haïti heureuse, t. II, Portau-Prince, Chéraquit, 1929, p. 5.
35 L’historien Jean-Jacques Doubout, reprenant l’expression de Luis Araquistaín, qualifie la Convention de 1915 d’« acte de décès de la souveraineté d’Haïti ». Mais il s’agissait plutôt de l’acte de naissance du nouvel État, car si la mort violente de l’ancien État fut l’œuvre des Cacos du Nord et du Nord-Est, son acte de décès fut rédigé par la foule à l’œuvre à travers les rues de Port-au-Prince durant les journées macabres des 27 et 28 juillet 1915. Voir respectivement ARAQUISTAÍN, Luis, La agonía antillana. El imperialismo yanqui en el mar caribe, Madrid, Espasa-Calpe, 1928, p. 142 ; DOUBOUT, Jean-Jacques (HECTOR, Michel), Haïti : féodalisme ou capitalisme ? Essai sur l’évolution de la formation sociale d’Haïti depuis l’indépendance, op. cit., p. 21.
36 Le 28 mars 1918, elle sera complétée par un acte additionnel la prolongeant pour une nouvelle période de dix ans. Voir CASTOR, Suzy, L’occupation américaine d’Haïti, op. cit., p. 63.
37 CASTOR, Suzy, ibid., p. 70.
38 Si l’effondrement de l’État permit aux marines d’occuper les points stratégiques de la capitale sans avoir à faire face à une résistance organisée, les Cacos n’avaient pas pour autant abandonné toutes les positions qu’ils occupaient avant l’intervention des Américains. Au contraire, ils étaient disposés à se battre pour imposer le docteur Rosalvo Bobo, leur chef, à la présidence. Mais ce dernier préféra attendre les élections législatives prévues pour le 12 août 1915. Cependant, lorsque l’amiral Caperton, le 6 août, ordonna l’évacuation de Port-au-Prince par les Cacos, une vive tension régna entre les marines et ceux-ci et il y eut des échanges de tirs entre les forces en présence, ce qui obligea l’occupant à utiliser des moyens forts pour les chasser de la capitale. Voir à ce sujet CASTOR, Suzy, L’occupation américaine d’Haïti, op. cit., p. 127.
39 DORSAINVIL, J. C., op. cit., p. 293.
40 CASTOR, Suzy, op. cit., p. 137.
41 Voir MANIGAT, Leslie F., op. cit., p. 72.
42 NICHOLLS, David, op. cit., p. 285.
43 Voir TROUILLOT, Michel-Rolph, op. cit., p. 116.
44 À partir de ce moment, « les hommes de Port-au-Prince seraient plus que jamais capables de contrôler effectivement le pays tout entier ». Voir SCHMIDT, Hans, op. cit., p. 235.
45 Voir DOUBOUT, Jean-Jacques (HECTOR, Michel), op. cit., p. 25.
46 Voir MOÏSE, Claude, Constitutions et luttes de pouvoir en Haïti. De l’occupation étrangère à la dictature macoute (1915-1987), t. II, Montréal, CIDIHCA, 1990, p. 32-41 et 49-74.
47 Ibid., p. 34.
48 SANNON, H. Pauléus et al., Memoir of the Political, Economic, and Financial Conditions existing in the Republic of Haiti under the American Occupation, n. p., 1921.
49 Voir JEAN-BAPTISTE, S. G., L’attitude de la presse port-au-princienne, 1915-1926, mémoire de licence non publié, Faculté d’Ethnologie, Université d’État d’Haïti, 1968.
50 « Educated and sophisticated Haitians objected to the vulgarity and the racial prejudice of the Americans. Accustomed to thinking of themselves as the light-skinned aristocracy of the country these men now found that in the eyes of North Americans they were all “niggers”. » SCHMIDT, Hans, op. cit., p. 137.
51 Voir MOÏSE, Claude, op. cit., p. 114.
52 BALCH, Emily Green, Occupied Haiti, New York, Writers Publishing Company, 1927, p. 39.
53 Ibid.
54 Voir TROUILLOT, Michel-Rolph, op. cit., p. 114.
55 La promotion d’une nouvelle classe moyenne en Haïti constituait l’un des principaux éléments de la stratégie américaine visant à transformer les structures sociale et économique de façon à garantir la stabilité du système politique du pays. À ce sujet, David Nicholls écrit: « The Americans hoped that political stability and responsible government could be developed in Haiti on the basis of a new middle class, and it was the policy of the administration to encourage the growth of such a class. » Voir NICHOLLS, David, From Dessalines to Duvalier, op. cit., p. 163.
56 « L’élite voit dans l’élévation d’une classe moyenne une menace à la continuation de son propre privilège de direction », avaient remarqué les membres de la commission Forbes en 1930. Voir VINCENT, Sténio, En posant les jalons, t. I, Port-au-Prince, Imprimerie de l’État, 1939, p. 340.
57 Voir GAILLARD, Roger, Les Blancs débarquent. Premier écrasement du cacoïsme, t. III, Port-au-Prince, Le Natal, 1981 ; Les Blancs débarquent. La République autoritaire, t. IV, Port-au-Prince, Le Natal, 1981 ; Les Blancs débarquent. Hinche mise en croix, t. V, Port-au-Prince, Le Natal., 1982 ; Les blancs débarquent. Charlemagne Péralte, le Caco, t. VI, Port-au-Prince, Le Natal, 1982 ; Les blancs débarquent. La guérilla de Batraville, t. VII, Port-au-Prince, Le Natal, 1983.
58 La corvée, la dépossession des petits paysans, la misère et la répression étaient les principaux facteurs à la base de l’exode rural et du départ massif des paysans pour Cuba et la République dominicaine. Voir CASTOR, Suzy, op. cit., p. 97-98.
59 FOUCAULT, Michel, Surveiller et punir, Paris, Gallimard, 1975.
60 Voir NICOLLS, David, From Dessalines to Duvalier, op. cit., p. 148. Dans cet ordre d’idées, Hans Schmidt écrit: « Occupation financial policy, like most facets of the occupation, looked first to American interests. » Voir SCHMIDT, Hans, The United States Occupation of Haiti, 1915-1934, op. cit., p. 234.
61 Voir CASTOR, Suzy, op. cit., p. 110.
62 Cité dans CUEVAS CANCINO, Francisco, Roosevelt y la buena vecindad, Mexico, Fondo de Cultura Económica, 1954, p. 52.
63 Pour réduire l’hostilité des Haïtiens envers l’accession des étrangers à la propriété et faciliter les investissements de capitaux américains dans l’agriculture en vue de moderniser l’économie du pays, malgré le régime d’occupation militaire, on dut recourir à des moyens forts tels que l’usage de la force, la dissolution du Parlement deux fois de suite, l’introduction du référendum, la manipulation et l’intimidation de l’électorat. Voir MOÏSE, Claude, op. cit., p. 67.
64 L’obsession de l’occupant à ce sujet est manifeste dans le rapport de 1928 du haut-commissaire Russel lorsqu’il écrit : « Le problème de la réforme du système judiciaire est d’une importance absolument fondamentale pour le développement d’Haïti. » Voir MILLSPAUGH, Arthur, Haiti under American Control, 1915-1934, Boston, World Peace Foundation, 1931, p. 118.
65 Voir NAU, Maurice et NEMOURS, Telhomme, Code domanial (1804-1930), Portau-Prince, Telhomme Nemours, 1930, p. 154-286.
66 Voir DOUBOUT, Jean-Jacques (HECTOR, Michel), op. cit., p. 22.
67 Transformé en journalier dans les compagnies américaines, le paysan gagnait un salaire qui variait entre 20 et 30 centimes de dollar pour les hommes et 10 centimes pour les femmes et les enfants. Voir Union patriotique, Mémorandum, 3 décembre 1929, ADE/Document/838.00/2591.
68 CASTOR, Suzy, op. cit. p. 98.
69 MILLSPAUGH, Arthur, op. cit., p. 143.
70 BALCH, Emily Green, op. cit., p. 76.
71 Voir Union patriotique, Mémorandum en date du 3 octobre 1929, ADE/Document/838.00/2581.
72 CASTOR, Suzy, op. cit., p. 99.
73 Note confidentielle du consul du Cap-Haïtien au département d’État en date du 22 mars 1924, ADE/Document/838504, cité dans CASTOR, Suzy, ibid., p. 101.
74 MILLSPAUGH, Arthur, op. cit., p. 143.
75 CASTOR, Suzy, op. cit., p. 100.
76 La brutalité des enclosures avait favorisé le développement de l’agriculture commerciale en Angleterre. Mais les paysans arrachés à leurs lopins de terre allaient constituer le prolétariat anglais dont des villes manufacturières et industrielles comme Manchester, Birmingham, Sheffield et Salford allaient avoir un si grand besoin. Voir MOORE, Barrington Jr., Les origines sociales de la dictature et de la démocratie, tr. fr., Paris, Maspero, 1968 (1966), p. 342.
77 Voir BLANCPAIN, François, Haïti et les États-Unis 1915-1934. Histoire d’une occupation, Paris, L’Harmattan, 1999, p. 200-201.
78 Voir MANIGAT, Leslie F., op. cit., p. 106-107.
79 BLANCPAIN, François, op. cit.
80 MANIGAT, Leslie F., op. cit., p. 107.
81 BLANCPAIN, François, op. cit.
82 CASTOR, Suzy, op. cit., p. 118.
83 MANIGAT, Leslie F., op. cit.
84 À ce sujet, Dantès Bellegarde, ancien ministre sous la présidence de Sudre Dartiguenave, le prédécesseur de Louis Borno, écrit : « Le haut-commissaire américain, le receveur américain des douanes, le directeur américain des contributions, le chef américain de la Gendarmerie, le chef américain du Service d’Hygiène, le chef américain des Travaux Publics, le directeur américain du Service technique d’agriculture…, à eux seuls manipulent 83,43 % de notre budget. » Voir BELLEGARDE, Dantès, L’occupation américaine d’Haïti, ses causes morales et économiques, Portau-Prince, Chéraquit, 1929, p. 31.
85 « Les frais supportés par le budget des États-Unis d’Amérique se limitèrent exclusivement aux soldes et frais d’entretiens des « marines » stationnés en Haïti. » Voir BLANCPAIN, François, op. cit., p. 206.
86 CASTOR, Suzy, op. cit.
87 BUELL, Raymond Leslie, op. cit., p. 128.
88 Voir MARTIN, John Bartlow, U. S. Policy in the Caribbean, op. cit., p. 25-26.
89 Le 6 décembre 1929, les marines ouvrirent le feu avec leurs mitrailleuses sur une foule de manifestants paysans à Marchaterre, dans le Sud, tout près de la ville des Cayes. J. C. Dorsainvil parle de 6 morts et d’une vingtaine de blessés et Suzy Castor fait mention de 20 morts et 51 blessés. Voir DORSAINVIL, J. C., op. cit., p. 296, et CASTOR, Suzy, op. cit., p. 174.
90 Voir CASTOR, Suzy, op. cit., p. 99.
91 Cité dans KNIGHT, Melvin M., Los Americanos en Santo Domingo. Estudios del imperialismo americano, Ciudad Trujillo, Listín Diario, 1939, p. 166-167.
92 CASTOR, Suzy, Le massacre des Haïtiens et les relations haïtiano-dominicaines, Portau-Prince, CRESFED/Le Natal, 1988.
93 Commentant cet événement, Roger Dorsinville, l’un des jeunes officiers ayant tramé le complot, écrit : « Ils avaient honte de leurs bottes astiquées et de sortir avec les filles, portant vingt-six mille cadavres à digérer. » Voir DORSINVILLE, Roger, Marche arrière, Montréal, Collectif Paroles, 1986, p. 75-84. Au sujet du nombre d’Haïtiens tués au cours de ce massacre, les auteurs n’arrivent pas à s’entendre sur un chiffre exact. Jean Price-Mars, par exemple, affirme : « Les uns l’évaluent (le nombre des victimes) à 12 000, d’autres à 15, 20 ou 25 000. Autant que des calculs partiels peuvent nous rapprocher de la vérité, il est possible de s’arrêter au chiffre de 12 136 tués et de 2 419 rescapés. » Voir PRICE-MARS, Jean, La république d’Haïti et la République dominicaine. Les aspects divers d’un problème d’histoire, de géographie et d’ethnologie, t. II, Port-au-Prince, Fardin, 1998 (1953), p. 312. De son côté, Thomas Fiehrer écrit: « The exact death toll is impossible to determine somewhere between 10,000 and 20,000. » Voir FIEHRER, Thomas, « Political Violence in the Periphery: the Haitian Massacre of 1937 », Race & Class. A Journal for Black and Third World Liberation, vol. 32, no 2, octobre-novembre 1990, p. 12.