Jovenel Moise veut bien montrer que son gouvernement est bien souché au PHTK de Michel Martely et qu’il veut bien achever certains projets que son chef n’avait pas pu mettre en place, tels que la réhabilitation de l’armée d’Haïti. En effet, le départ des forces occupantes de la Minustah n’a fait qu’accélérer le processus de reconstruire les forces armées qu’avait déjà entrepris le premier régime kaletèt de Martelly-Lamothe, quand le président équatorien Raphael Correa avait aidé en ce sens puisque le mardi 1er septembre 2015 à l’École de formation des soldats de l’armée (ESFORSE), s’était tenu la cérémonie de graduation de quelques 40 soldats haïtiens du corps de génie.
Ce dossier en fait est devenu une priorité pour l’administration Moïse-Lafontant et justement cette volonté politique Moise l’avait clairement exprimée au cours de sa campagne électorale quand il déclarait que « Les Forces Armées d’Haïti c’est une prérogative constitutionnelle […] Un pays n’est pas maître de lui-même s’il n’a pas une Force Armée […] la force d’un pays est basée sur un système de défense qui est fort, une armée moderne qui est fondée sur l’objectif d’assurer la protection du pays » En réalité quelles sont les vraies raisons pour le retour des Forces Armées même quand pour le justifier Jovenel Moise renchérissait que « […] L’armée d’Haïti figure jusqu’à présent dans la Constitution. Il ne faut pas avoir peur de le dire. Haïti a son essence dans l’armée […] »
Dans une interview avec la revue Challenges datée du 2 Octobre 2015, Jovenel Moise avait lui-même indiqué le type d’armée qu’il aura dans le pays « Je vais m’inspirer du Livre blanc de la Défense, qui définit les grandes orientations d’une armée professionnelle haïtienne de plusieurs milliers de militaires. Surveiller les ressources naturelles, les grandes plantations, gérer les catastrophes naturelles, bien garder les frontières terrestres maritimes et aériennes contre la contrebande et les trafics de toutes sortes, faire face au terrorisme. Ce sont des missions urgentes. Cette nouvelle armée professionnelle devra s’y atteler. De toute façon, historiquement, l’armée fait partie de notre identité. Nous ne pouvons effacer l’histoire avec un simple chiffon pour des raisons émotionnelles et temporelles. »
Des militaires haïtiens du corps de génie formés en Equateur
Cette propagande autour de l’Armée n’a qu’un seul sens, comme c’est l’intérêt de classe qui prime ; les hommes au pouvoir et leurs alliés de la bourgeoisie s’entendent à ce qu’ils aient des hommes armés ayant des armes de guerre pour les défendre face à l’armée des pauvres, des chômeurs, des laissés pour compte. Pourtant le peuple lui-même n’est qu’à la recherche d’une petite et simple survie et n’a besoin d’aucune Armée pour sa sécurité, le pays n’étant pas en guerre ; toute armée ne serait pour lui qu’un poids financier extrêmement lourd qui sans aucun doute réduirait davantage la pitance que devrait avoir la grande majorité défavorisée de la population.
Cependant la bourgeoisie haïtienne le voit différemment, la police est insuffisante pour leur garantir la sécurité face à la population. Une armée avec des armes de guerre lourde pourrait mieux confronter les masses populaires que les policiers. C’est dans cette optique politique que nous devons comprendre ce que cachent les adversaires du peuple ; quand le ministre de la Défense Hervé Denis « considère la situation comme urgente tenant compte du retrait des militaires de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation d’Haïti (Minustah). » et au président du sénat Youri Latortue un ancien militaire de crier haut et fort « Remplacer la MINUSTAH par la MINUJUSTH, c’est blanc bonnet, bonnet blanc ». Latortue, depuis qu’il était conseiller de son oncle le Premier ministre de facto Gérard Latortue n’a jamais dénoncé l’occupation du pays comme le faisaient les compatriotes anti-occupation et anti-impérialistes ; au contraire il jouissait de leur présence ; mais pour revenir avec ses militaires il l’utilise comme un alibi quand il « exige un retrait définitif de la mission onusienne et encourager l’adoption des principes de la loi mère voulant la présence de deux forces armées sur le territoire, la police et l’armée ». Et Rosny Desroches le Directeur exécutif de l’ISC l’a renforcé dans sa démagogie à outrance: « Il nous faut des forces armées au pays pour maintenir l’ordre et la Paix publiques ».
Le ministre de la Défense Hervé Denis
Ainsi l’actuel régime commence à mettre les bouchées doubles allant dans ce sens et le ministre de la Défense, Hervé Denis a tout bonnement affirmé au Senat, le jeudi 20 Avril au cours d’une réunion du Premier Ministre Jack Guy Lafontant, accompagné de son cabinet ministériel « avoir déjà mis tout en œuvre pour la mise sur pied de cette force militaire tant longtemps souhaitée » et « qu’un Haut commandement des forces armées sera nommé » et d’autres en plus qu’un « plan sur le recrutement des nouveaux militaires a été soumis au chef de l’état et au Premier Ministre » pour ajouter ensuite « que le processus administratif devant faciliter le recrutement de 500 nouveaux militaires est lancé ». Le ministre Denis ne pouvait être plus clair quand il indiquait qu’ « au cours des prochaines semaines les fonctionnaires du ministère de la défense devront réaliser un inventaire des bases et campements des Forces Armées d’Haïti (FAD’H). Les baraquements dans la zone frontalière devraient être réhabilités dans un délai record afin de favoriser la lutte contre la contrebande. De plus le gouvernement espère obtenir certains matériels des troupes de la Minustah qui quitteront le pays avant le 15 octobre 2017 ».
Bien entendue, ce ne serait pas une armée progressiste visant réellement à défendre la nation, servir et défendre le pays en marchant main dans la main avec le peuple ; mais à l’utiliser pour combattre le peuple en cas de besoin.
Ce serait une armée au service de la clique au pouvoir et de la classe dominante antinationale de façon à les protéger contre la colère du peuple, une sorte de commandeurs au service des exploiteurs et des pillageurs des ressources du pays.
Voici la feuille de route du Premier ministre Jack Guy Lafontant, remise au Ministre de la Défense Hervé Denis, pour la mise en place de l’armée d’Haïti :
« Vous allez travailler pour mettre l’armée de terre au service de la Nation. Dans ce sens, vous devez :
– Élaborer et faire voter par le Parlement la loi portant réorganisation et fonctionnement des Forces Armées D’Haïti (FAD’H) ;
– Élaborer et faire voter par le Parlement la loi de programmation militaire ;
– Travailler avec les ministères compétents pour élaborer et faire voter par le Parlement la loi portant création de la Direction Centrale de Renseignement Militaire (DCRM) ;
– Collecter des informations d’importance stratégique pour le Conseil National de Sécurité (CNS).
Les Forces Armées D’Haïti doivent compter dans leur rang des ressources humaines qualifiées. A cet effet, un budget va être progressivement alloué au Ministère de la Défense. Un corps du Génie militaire et un Hôpital militaire de niveau universitaire vont être créés, en vue de permettre aux Forces Armées D’Haïti d’atteindre leurs objectifs. Vous appuyez sur les lois et les dispositions constitutionnelles pour :
– Assurer la connaissance des risques, des menaces et des ruptures potentielles de tout type ;
– Anticiper les crises par le renforcement des structures de surveillance ;
– Maintenir la fonction de dissuasion ;
– Disposer en permanence des forces pré-positionnées pour mieux secourir et défendre le territoire ;
– Contribuer à la protection de la population sur le territoire national, à la résilience de la Nation, face aux risques et menaces de toutes sortes (terrorisme,trafic de stupéfiants, grand banditisme, catastrophes naturelles, etc.) ;
– Renforcer la sécurité des installations d’importance vitale ;
– Sécuriser le territoire (air, terre, mer) ;
– Soutenir les dispositifs de sécurité intérieure et de sécurité civile ;
– Contribuer à la sécurité internationale en participant aux opérations de stabilisation et de maintien de la paix ;
– Assurer la sauvegarde des intérêts de la Nation ;
– Assurer en permanence et avec efficience les missions de défense nationale ;
– Avoir des services et unités spécialisés concourant aux missions de protection de l’intégrité du territoire et à la protection de la population ;
– Réaliser des activités civiques, de protection de l’environnement et de développement ;
– Soutenir les autres composantes de l’Armée nationale ;
– Secourir la population et aider les services de protection civile lors des désastres et catastrophes naturelles ;
– Contribuer à protéger et sécuriser les sites vitaux de la Nation ;
– Aider la police à contrecarrer les éventuelles activités terroristes.
Afin que l’État haïtien puisse affirmer sa souveraineté dans ses eaux territoriales. Je vous demande de prendre les dispositions pour :
– Assurer la défense du littoral ;
– Protéger les frontières maritimes ;
– Surveiller le territoire maritime ;
– Soutenir les autres composantes de l’Armée nationale ;
– Assurer des patrouilles maritimes.
Vous devez sauvegarder les intérêts économiques du domaine maritime. Dans cette perspective vous allez :
– Veiller aux pratiques légales de pêches maritimes ;
– Lutter contre la pollution maritime (hydrocarbure, déchets toxiques) ;
– Lutter contre la contrebande et le trafic de stupéfiant ;
– Assurer l’exploitation légale des biens culturels et des trésors sous-marins.
Il y a lieu d’assurer les services publics dans les eaux territoriales. Pour ce, le ministère de la défense doit :
– Apporter les secours et les assistances aux navires et aux personnes qui sont en danger dans la Zone Économique Exclusive d’Haïti ;
– Assurer des missions de transports de services publics ;
– Assurer les missions d’évacuation sanitaire.
Depuis des années, la défense de l’espace aérien n’est pas assurée. Il y a nécessité de :
– Défendre l’espace aérien haïtien ;
– Protéger et défendre les zones aéroportuaires ;
– Appuyer les autres forces dans le transport et largage de matériels et d’hommes ;
– Surveiller et protéger les ressources halieutiques ;
– Aider à la recherche et au sauvetage des navires et avions en perdition.
Je vous demande d’engager la préparation du Budget 2017-2018 qui devra être approuvé, après arbitrage du Ministère de l’Économie et des Finances, par le Conseil des Ministres et déposé dans les délais légaux requis au Parlement.
Vous aurez aussi la tâche de renforcer la transparence, la lutte contre la corruption et la bonne gestion des biens et deniers publics. Il vous appartiendra d’organiser, de diriger et d’animer les services, équipes et agents de l’Etat placés sous votre responsabilité. »
Mais quelle armée peut nous construire la clique à Martelly-Jovenel-Latortue, si ce n’est une armée de bandits, de mercenaires, de trafiquants et de putschistes au service des forces impériales à l’instar d’un Paul Eugene Magloire, d’un Cédras. Le peuple doit dire Non à une armée défendant les intérêts de classe de la bourgeoisie ! Non à une armée répressive à l’instar des anciennes forces armées d’Haïti !
Au peuple haïtien de s’organiser et de monter sa propre armée révolutionnaire à l’instar de nos ancêtres indigènes pour combattre les nouveaux colons et contrecarrer leurs actions malhonnêtes de réduire le pays à sa plus simple expression.