C’est avec un large sourire qu’Emmanuel Bo remplit rapidement son bidon d’eau dans un des robinets qui se trouve juste en face de sa maison, un investissement qui a radicalement changé sa routine. En effet, ce jeune homme de 16 ans doit tous les matins, avant d’aller à l’école, collecter de l’eau pour faire tourner la boulangerie familiale. Il y a juste quelques semaines, il devait en moyenne marcher une trentaine de minutes pour s’approvisionner en eau dans une des deux sources sauvages de Casse, une communauté rurale située dans la région du Plateau central.
Pour les habitants de Casse située à la frontière entre Haïti et la République Dominicaine, la construction de ce nouveau réseau de distribution est une avancée primordiale qui leur permet d’avoir un meilleur accès à l’eau potable et de réduire leurs risques de contracter de maladies d’origine hydrique. Selon une étude récente de la Banque mondiale « Regarder au-delà de la provision par le gouvernement des services en eau et assainissement – Les choix et pratiques des plus vulnérables en Haïti », la fourniture d’ un meilleur accès aux services d’eau et d’assainissement a un impact positif sur la santé des populations et en particulier celle des enfants.
Des inégalités d’accès à l’eau
Dans ce paysage rural de Casse où se mélangent les champs de tabacs, arbres fruitiers, étangs et petites maisons, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement est une véritable préoccupation des habitants de cette petite communauté loin des villes.
En milieu rural, seul un haïtien sur deux met moins de trente minutes pour accéder à un point d’eau potable. Une large partie de la population doit parcourir de grandes distances pour espérer arriver à un point d’eau potable. Sur tout le territoire, seuls 12 % des ménages ont accès à l’eau potable sur leur lieu de résidence, et en milieu urbain beaucoup ont recours aux services du secteur privé pour l’accès, ce qui augmente les dépenses annuelles des ménages.
L’inventaire national des infrastructures d’eau potable réalisé en 2017 montre qu’il existe des disparités importantes entre et au sein même des départements. Par exemple, l’accès à l’eau dans la Grande-Anse se situe autour de 28% alors qu’il est autour de 52% dans les départements du Sud et Centre. Dans l’Artibonite les taux d’accès varient entre 7% et 74%, et dans la Grande Anse entre 0% et 55%.
Vers un accès universel à l’eau potable et l’assainissement
Des défis majeurs persistent pour améliorer l’accès à l’eau et l’assainissement notamment en prenant mieux en compte les besoins du consommateur, et en instaurant une culture de gestion déléguée qui met l’accent sur l’efficacité des opérateurs locaux des réseaux de distribution en eau.
Pour répondre à ces enjeux, la Banque mondiale appuie la Direction nationale de l’eau potable et de l’assainissement (DINEPA). Une approche « Budget Programme par Objectifs » a été mise en place et permet de planifier les activités nécessaires à l’atteinte de Objectifs Développement Durable (ODDs) à l’horizon 2030, y inclus l’accès à l’eau et l’assainissement. Un investissement annuel de l’ordre de 124 millions de dollars est nécessaire pour atteindre ces ODDs.
Ainsi, la Banque mondiale finance la construction et la réhabilitation d’infrastructures appropriées pour améliorer l’accès à l’eau et l’assainissement en milieu rural et péri-urbain à travers le projet « Eau Potable et Assainissement en milieu Rural Durable (EPARD).
C’est grâce à cette initiative, qu’aujourd’hui, Emmanuel Bo et les autres résidents de sa communauté rurale ont un meilleur accès à l’eau potable sur le pas de leur porte.