Le développement participatif est un concept à la mode. Il est un gage susceptible de donner une impulsion à la bonne
gouvernance. Mais au “pays des hommes intègres”, il semble être une vue de l’esprit. Les actes de gouvernance sont dans la plupart des cas, à sens unique. Ce manque de cohésion entre gouvernants et gouvernés porte un terrible coup à l’exercice de la citoyenneté.
L’érection en grande pompe des communes urbaines , n’a pas encore pu inverser la tendance. La situation est plus grave dans les zones rurales. Certaines localités des provinces sont totalement en déphasage avec les
mutations politiques du pays. Plus de deux cent ans après les indépendances, une telle situation révèle, de fort belle manière, qu’Haiti est mal partie. Et qu’elle cherche en vain les chemins conduisant à la “terre promise”.
A l’évidence, il ne peut avoir de démocratie sans une participation pleine et entière des populations. Aujourd’hui, Port au Prince, bien qu’étant la capitale, se présente comme une ville pleine de paradoxes. D’un côté, l’opulence règne en maître et de l’autre, la pauvreté s’érige en spectre. Cela n’est pas étonnant en soi.
Mais le problème, c’est que ce tableau que le pays traine depuis belle lurette, est le produit d’une mauvaise gestion des affaires publiques. La décentralisation ? Difficile de l’inscrire dans le champ du concret. Elle est souvent sous-tendue par des pratiques politiciennes dictées par la ferme détermination d’ériger ou de protéger des intérêts contraires à la volonté populaire. Les élans d’espoir, pronés à cor et à cri, ont souvent été intentionnellement étouffés.
On réduit ainsi les citoyens à un “bétail électoral”. Comme s’ils n’étaient utiles que pour voter et payer des taxes. Si seulement les élections, organisées à coup de millions, se déroulaient en toute transparence ! L’Etat aurait au moins pris une bonne bouffée d’oxygène démocratique. Mais depuis tantôt longtemps , les résultats des élections ne reflètent pas le choix réel du peuple.
Il s’agit généralement de mises en scène savamment orchestrées pour se maintenir au pouvoir. Une telle situation crée, tôt ou tard, des frustrations incontrôlables. A défaut de s’exprimer par la voie des urnes, on en vient à opter
pour celle des grèves à répétition et même des armes. L’Etat gagnerait à redimensionner sa politique, pour éviter que
les odeurs nauséabondes des pratiques malsaines n’étouffent le processus démocratique. Dans cette optique, des numéros verts affectés à des structures spéciales auxquelles les citoyens pourraient porter plainte sans être inquiétés, seraient salutaires.
Car, bien souvent, la peur et le manque de confiance s’installent dans l’esprit des individus lorsqu’il s’agit de s’adresser à la police inconnue et corrompu. On pourrait ainsi penser à la création d’une police des polices, donc incorruptible et soucieuse de l’intérêt général, sans pour autant être budgétivore. D’où la nécessité de créer un Collège de sages, cela est possible et aurait l’avantage de donner un coup de pied à la fourmilière de la mal-gouvernance en ce qu’il pourrait créer des réflexes nouveaux dans la gestion du patrimoine national.
Rackets, commissions occultes, corruption, etc. pourraient progressivement s’atténuer. Mais pour y arriver, il faut bien que l’Etat s’engage à mener une vaste campagne d’information et de formation afin que les populations soient pleinement imprégnées de leurs droits et devoirs, afin qu’elles soient des actrices à part entière de la vie nationale.Mais tout cela relève d’une volonté politique avec à la clé, une éducation civique.
Sinon, le pays continuera de végéter à la périphérie de ses priorités. Et ce sont les populations qui continueront d’en pâtir. Le pays sera ainsi en permanence dans le cercle infernal des 10 derniers pays du classement annuel
du PNUD sur le développement humain durable. La lutte contre la pauvreté sera alors comme une caverne d’Ali Baba, un lieu où il est permis à certains de tout faire.
L’opposition politique et la société civile doivent également mieux se structurer et s’engager à poser des actions concrètes pour que la citoyenneté, élément fondateur de la bonne gouvernance, ne sonne toujours pas creux.